Chemin ancien n°2 : Evrehailles (Bauche) - Durnal

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Chemin ancien et cartographie

Fruit de siècles de cheminements nécessaires entre deux villages, le chemin creux marque d’une trace nette le paysage géographique.

Ce chemin, creux sur une grande partie de son parcours, est déjà cité dans un texte de 1755.

On distingue sa silhouette sur la carte de cabinet des Pays-Bas autrichiens levée à l’initiative du comte Joseph François de Ferraris entre les années 1771 et 1777. Le comte de Ferraris commandait l’artillerie des Pays-bas et son école de mathématique. Il disposait d’un personnel nombreux et qualifié. Levée sur le terrain, la carte «de Ferraris» a été conçue pour une utilisation militaire avec une édition à petite échelle – une échelle de 1/11520 c-à-d que 1 centimètre de la carte équivaut à 115 mètres sur le terrain- mais avec aussi une édition à plus grande échelle pour un usage marchand.

post-body-image extrait de la carte Ferraris

Cette carte révèle beaucoup de détails très précis. Non seulement elle permet de distinguer les champs des potagers mais dans le couvert forestier, on différencie les hautes ou basses futaies ainsi que les bois de conifères; elle mentionne les marais –précisés franchissables ou non- les gués, le sens des sillons de labour des champs, les gibets et même l’appartenance paroissiale des divers hameaux, de même que les noms de lieux. En somme, tous les repères disponibles pour s’orienter ainsi que tous les renseignements utiles pour le déplacement des cavaliers: un cheval monté ne passant pas dans un bois de taillis, il faut prévoir de le contourner… On y voit également tracées des lignes discontinues coloriées figurant les frontières et diverses limites administratives. La couleur jaune-brun pour le territoire du Comté de Namur; la couleur bleu-mauve pour la Principauté de Liège. La carte couvre en effet les Pays-Bas autrichiens mais aussi le territoire de la Principauté de Liège. En 1777, les territoires de ces deux «puissances» étaient étroitement imbriqués les uns dans les autres. Notamment à Durnal où le nord du village faisait partie de la principauté de Liège tandis que le sud relevait du comté de Namur. Aujourd’hui, une des rues du village témoigne encore de cette ancienne appartenance: elle porte le nom de «rue du Pays de Liège».

Itinéraire

Passage après passage, les pieds, les sabots, les roues délogent terre, cailloux, gravier. Génération après génération, le chemin se creuse, il s’incruste dans le paysage tout comme la roue du chariot marque son sillon sur la pierre de schiste.

Quoique les chemins anciens tracent généralement la ligne la plus directe entre un village et un moulin ou une forge ou un autre village, ils évitent quand même les «fonds», humides et fort boueux l’hiver. Les vieux itinéraires négligent les pentes raides, trop pénibles à monter pour les attelages, trop dangereuses à descendre; ils suivent plutôt les vallées, à mi-pente, pour grimper finalement calmement sur les dessus.

Tch’min dès bènes

Entre Bauche et le plateau des Loges, ce chemin était désigné sous le nom de «tch’min dès bènes». Alimenter en charbon de bois les forges et hauts-fourneaux de la région générait un charroi important: de nombreuses bennes, des charrettes remplies de charbon étaient sorties du bois par le «Tch’min dès bènes» et ensuite acheminées dans la vallée où se trouvaient les forges. Les bois des Loges et de l’Herbois furent intensivement exploités jusqu’à la Révolution Industrielle. On y a retrouvé quantité d’aires de faulde. Les «aires de fauldes» sont des surfaces circulaires, vestiges de la meule de bois bâtie pour se consumer lentement en se transformant en charbon de bois. Les charbonniers habitaient dans une hutte de branchages –la loge, près des fauldes qu’ils devaient surveiller attentivement. Le nom «bois des Loges» nous est resté.